« Tout cela me paraît bien léger ! ». Voici le commentaire quelque peu condescendant que l’on peut entendre lorsque le propos de l’interlocuteur ou la proposition de l’artiste semble manquer de profondeur. Critique plutôt négative donc.
A contrario, être léger c’est faire fi de l’attraction terrestre, se libérer des carcans et des conventions parfois pesantes de l’industrie musicale. Être léger ne signifie pas allégé, c’est conserver tous les ingrédients mais en sublimant leur saveur. Ce compliment s’applique au nouvel album de Sean O’Hagan, le deuxième en 29 ans sous son nom propre. A l’instar du regretté Hubert Mounier, grand représentant français de la ligne pop claire, l’Irlandais a décidé de « Voyager léger ». Et sa production tend une nouvelle fois vers des sommets déjà touchés par les Grands Anciens de la Pop. Grands Anciens dont l’esprit est parfois resté embrumé, grisé par l’ivresse des cimes, Brian Wilson en tête. Épaulé par son vieux complice de Microdisney, Cathal Coughlan, le leader des fabuleux High Llamas (ah ! réécouter l’album Santa Barbara !) lui, a su rester l’esprit clair et ouvert. Les mélodies de ce nouvel LP relèvent aussi bien des canons pop que de l’electronica cher au groupe franco-britannique Stereolab, dans lequel le multi-instrumentiste a joué entre 1993 et 1994 et qu’il accompagne encore parfois lors de concerts.

Le ton de l’album tout entier est donné par le single On a Lonely Day (Ding, Dong). Sean O’Hagan nous emmène dans un monde de bulles de savon que l’on se plaît à observer grossir et dont on ne sait où elles vont aller lorsqu’elles s’envolent, nous échappent et que l’on espère, en retenant notre souffle, qu’elles n’éclateront pas. La vie est ainsi vue à travers le prisme déformant de ces globes éphémères aux trajectoires aléatoires (« radum »). Du duo amoureux (?) Take My Steps (Nora Bramms) en passant par I Am Here à l’atmosphère féerique ou encore l’instrumental Better Lull Bear jusqu’au presque easy listening Clearing House, les titres nous entraînent dans le monde fantasque et ironique du chanteur où le temps qui passe est suspendu, le temps d’un album, le temps d’une bulle de savon…
″Être léger c’est opposer la grâce à la mauvaise humeur… c’est un luxe, l’un des seuls qui nous restent. Alors cultivons-le″, disait Sacha Guitry. Sean O’Hagan demeure depuis plus de trois décennies parmi les orfèvres pop les plus précieux de notre époque. Gageons que le garçon continue à se payer le luxe d’être toujours léger et à ne pas être avare de sa production (seul ou bien accompagné), afin que nous puissions le plus longtemps possible en profiter. Nous répondrons toujours présents à l’appel.
Tracklist
1.Candy Clock
2.Better Lull Bear
3.I Am Here
4.The Paykan (Laili’s Song)
5.McCardle Brown
6.Clearing House
7.On A Lonely Day (Ding, Dong)
8.Spoken Gem
9.Sancto Electrical
10.Take My Steps (Nora Bramms)
11.Radum Calls
12.Calling, Sending