Après sept albums salués à la tête des Ladybug Transistor, Gary Olson vient de se lancer en solo, bien entouré à l’écriture et à la production par les frères Åleskjær du groupe délicieusement pop The Loch Ness Mouse. Enregistrées entre les Etats Unis et la Norvège, ces chansons ont quelque chose de l’insouciance contagieuse des premiers Lloyd Cole ou de la beauté simple dénudée de certains titres du Protest Songs de Prefab Sprout. Avec la trompette de Gary Olson en plus. Dans cette interview, Gary revient également avec nous sur ses premiers émois musicaux et son premier synthé.
Bonjour Gary, à quel point l’environnement dans lequel tu as grandi a-t-il joué un rôle dans ta passion pour la musique ?
Le fait qu’on me mette une trompette entre les mains quand j’étais en 5ème (7th grade) m’a peut-être montré le chemin. J’ai ensuite eu la chance de faire un stage dans une station de radio quand j’étais au lycée et j’y ai appris les bases des techniques d’enregistrement. Ça a forgé mon approche du studio et je les utilise toujours. Il y avait aussi plein de très bons magasins de disques à Greenwich Village à l’époque. Près de l’école, il y a en avait quatre ou cinq les uns à côté des autres.
Est-ce qu’il y avait beaucoup de musique à la maison ? Des musiciens dans la famille ?


Mon père était joueur de trombone et il continue à se passionner pour la musique. Il était toujours branché sur la radio FM WBGO, qui joue plein de jazz traditionnel. Mes deux parents sont ministres du culte luthérien, donc j’étais bercé par la musique religieuse le dimanche. L’église disposait d’un énorme orgue à tuyaux qui me fascinait à l’époque. Observer l’organiste qui activait tous ces pistons et les pédales m’ont sans doute donné envie d’économiser et de me payer mon premier synthé, un Roland Juno 106 ! J’ai gardé le vieux piano familial et il apparaît sur la plupart des disques des Ladybug Transitor. Comme par exemple sur la chanson Six Times, extraite de l’album The Albemarle Sound (1999).

Quels sont tes premiers émois discographiques (radio, CDs, concerts) ?
Disons que c’était assez mélangé… On avait une grosse chaîne hi-fi dans le salon à la maison. Dans mes premiers souvenirs, il y a la bande originale de Star Wars et de vieux albums de disco… puis plein de chansons commerciales des années 80 qui passaient tout le temps à la radio. On recevait des K7 tous les mois d’un club auquel on était abonné. Quand j’étais en 6ème (6th grade), j’étais un grand fan des Beatles mais à l’adolescence j’ai commencé à me tourner vers des stations de radio plus indépendantes ou universitaires qui passaient de la New Wave et des trucs vraiment éclectiques. J’ai découvert des groupes locaux et je me suis débrouillé pour aller les voir en concert dans les bars de Manhattan (avec une fausse pièce d’identité !). Je me souviens une nuit avoir entendu à la radio The Jesus and Mary Chain et je me suis demandé par quelle magie ils obtenaient un tel son.
Est-ce qu’il y a une chanson qui te fait pleurer ?
L’EP de Robert Wyatt, A Short Break, qui date de 1992. Je n’irai pas jusqu’à dire qu’il me fait pleurer mais je ressens une certaine mélancolie ! Il véhicule une atmosphère intime, pluvieuse. Il y a une économie de mots et ce style chanté parlé. Robert a joué de tous les instruments et produit lui-même. C’est un peu comme si vous étiez assis dans la pièce pendant qu’il joue. Je me souviens avoir ressenti comme un grand soulagement quand je l’ai entendu car c’était très différent de ce qu’on entendait à ce moment-là. C’est un des albums de cette époque dont je me sens toujours proche.
Quelle a été la première chanson que tu as écoutée aujourd’hui ?
Quand je suis entré dans la voiture de mon pote ce matin, il écoutait The Ledge, un titre de l’album Tusk de Fleetwood Mac. Une chanson rapide et un peu destructurée de Lindsey Buckingham. Je ne suis pas encore complètement convaincu par Tusk ! Je suis plus le genre de gars qui écoute leur album suivant, Mirage, mais il faudrait que je le réécoute.

Quelle chanson d’un autre artiste aurais-tu aimé écrire ?
Une de mes chansons favorites est Rainy Night in Giorgia de Tony Joe White. J’aime tout, le phrasé, les cordes et les nappes de l’orgue Hammond. C’est ma définition de la perfection dans l’exécution et l’enregistrement d’une chanson.
Si tu pouvais vivre à une autre époque, laquelle choisirais-tu ?
On ne m’a jamais posé ce genre de questions ! Je dirais n’importe où, et à une époque où il y avait encore de vastes étendues de cette planète à découvrir auxquelles on pouvait rêver. Vers le milieu du 17ème siècle ?
Est-ce que tu as un endroit, un moment et un instrument spécifiques pour pouvoir composer ?
Je ne joue vraiment bien d’aucun instrument. Quand je me mets à travailler sur des paroles ou des mélodies, il faut que je m’aère souvent. Je fais des pauses afin de trouver l’inspiration. Parfois je commence à bosser sur un bout de chanson à mon home studio puis je vais me balader. Si j’ai de la chance, pendant ma petite escapade dans le parc des idées vont me tomber tout cru du ciel dans le bec. Le challenge est de réussir à s’en rappeler une fois que je suis de retour en studio !
Qu’est-ce que tu pourrais nous dire de ton premier album solo?
J’ai collaboré avec les frères Jørn et Ole Johannes Åleskjær (du groupe The Loch Ness Mouse) qui sont de très bons amis venus tout droit de Norvège. Jørn distille des idées à la chaîne comme une véritable usine ! Ils m’ont envoyé une trentaine de bouts de morceaux sur une période d’un an. J’en ai choisi 10 que Ole a produits. Ça a nécessité plusieurs allers-retours pour les sessions de studio avec les musiciens. Puis la magie d’Ole en studio a agi une fois que j’étais de retour à la maison. Je dirais que ça ressemble pas mal à ma vision d’un album de pop. Plutôt direct dans sa structure, avec peut-être aussi un petit parfum de campagne norvégienne.

Laquelle de tes chansons illustre bien cette interview ?
Je dirais Navy Boats. Ce serait mon choix de 3e single de l’album s’il y en avait un.
Discographie :
Solo
Gary Olson (2020)
Avec The Ladybug Transistor
Marlborough Farms (1995)
Beverley Atonale (1997)
The Albermarle Sound (1999)
Argyle Heir (2001)
The Ladybug Transistor (2003)
Can’t Wait Another Day (2007)
Clutching Stems (2011)