Julien Ledru – White Oak Blues

Le folk instrumental de Julien Ledru nous invite à un voyage mélancolique à travers les grands espaces américains.

Les premières notes du nouvel album de Julien Ledru annoncent d’emblée la couleur de l’ensemble : on devine que l’on part pour une traversée qui sera faite de tourments, de mélancolie délicieuse, d’embardées spectaculaires, de douces approches harmoniques.
Ce musicien singulier, rémois d’origine mais installé dans la capitale, qui assure dans une autre vie les parties rythmiques du groupe de soul rock The Ready-Mades, en est à son deuxième album et a décidé de faire du fingerpicking un mode d’expression en soi, sans fioritures et sans production.

De paroles, vous n’en croiserez donc aucune sur White Oak Blues et pourtant les morceaux sont beaucoup plus parlants que la plupart des nouveautés à texte, souvent scandées sans talent par des voix pâles qui finissent au mieux par se faner au milieu du trajet, au pire par insupporter l’auditeur dès le deuxième morceau. Rien de tel ici puisqu’aucun ennui ne pointe, aucune ombre au tableau ne vient assombrir les accords plaqués avec dextérité, sans qu’ils ne tournent à la démonstration ennuyeuse. On avouera sans peine avoir découvert cet artiste avec cette deuxième sortie et avoir été, avant de prêter une oreille aux mélodies savoureuses de Ledru, un peu décontenancé par la nature du projet (pas de voix, pas d’instruments autres qu’une guitare et un banjo), en se demandant s’il allait pouvoir tenir sur la longueur, et nous avec… Mais ce disciple de Elizabeth Cotten et de John Fahey embarque littéralement l’auditeur avec une sincérité qui force le respect, parsemant les climats qu’il nous livre d’accords lumineux dans un style très simple mais d’une efficacité remarquable.

© Hervé Le Gall

Julien Ledru parvient de la façon la plus touchante à diffuser ses ondes mélodiques sans prétention aucune, sinon celle de toucher ses cibles en plein cœur. Propice à la rêverie mélancolique, sa musique se répand insidieusement dans les moindres recoins, vient se loger là où on ne l’attend pas et le fil des plages musicales s’écoule doucement au terme d’une première écoute qui ne suffira pas à révéler toute la beauté et la profondeur de l’objet. On ne vous parlera pas de l’hommage à Daniel Johnston, à qui le disque est dédié, qui reste l’un des sommets de ce long format, tant on risquerait d’oublier des moments tout aussi réussis qui n’ont pas à pâlir de la comparaison. Le plus difficile reste de savoir si cette ballade originale pourra trouver un public ou si elle sera encore une fois vouée à une confidentialité relative, décidément totalement injustifiée.

Pour ceux qui hésiteraient encore, il faudra se souvenir de l’effet qu’a produit sur nos vies la première écoute de Sempiternal Darkness de Felt. Si cela ne vous a rien fait, passez votre chemin. Si vous avez encore en mémoire les sensations procurées par ce joyau, jetez vous sur ce disque, il est fait pour vous.

julienledru.com

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