Julian Cope – Barrowlands

Fuck off & di / Head Heritage

En 1995, Julian Cope a déjà derrière lui l’une des œuvres les plus fabuleuses que le rock anglais ait pu engendrer depuis le début des années 80, mêlée d’audace, de psychédélisme et de références à ses héros de toujours que sont Syd Barrett et Roky Erickson. Il vient de sortir 20 Mothers, double album signé sur le label Echo, rempli de pépites pop magnifiquement arrangées, que viennent bousculer des brûlots rock pétaradants d’inspiration. Le garçon est comme ça : il aime le rock le plus sauvage comme les mélodies les plus soyeuses – s’affranchissant volontairement des formats qui lui sont suggérés par son label (pourquoi faire court quand on peut faire long… ?) – et non sans qu’il s’évertue, avec une pertinence qui lui vaudra une reconnaissance méritée de ses pairs,  à écrire sur ses lubies que sont le krautrock, les mégalithes et le garage indépendant japonais. Il a déjà à ce stade publié de véritables encyclopédies sur ce qui n’intéresse presque personne, mis à part quelques initiés qui le liront pour l’aspect documentaire de ses ouvrages, tout en savourant le ton corrosif de son expression écrite (ton corrosif dont il n’est d’ailleurs pas avare en concert quand il s’agit d’invectiver la foule).

De concert justement, il est question dans ce nouveau disque, qu’il sera peut-être difficile au lecteur de se procurer puisqu’il ne bénéficie d’aucune distribution française, si ce n’est en commandant l’objet directement sur Head Heritage, le site de l’intéressé. Ce live, enregistré au Barrowlands de Glasgow, en 1995 donc, et publié vingt quatre ans après (va savoir pourquoi…), s’inscrit dans le reflet le plus fidèle de ce qu’étaient Julian Cope et sa formation à ce moment précis de la prise de son : absence d’overdubs, du larsen en pagaille, du psychédélisme vaudou, du mellotron 400, des climats inquiétants, des arrangements foutraques, de longues conversations hilarantes avec le public et, en définitive, le vrai concert d’un groupe constitué pour cette tournée au cours de laquelle Cope proposait de jouer, trois heures durant, un répertoire que trop peu encore considèrent comme très injustement sous-estimé.

Julian Cope
© Paul Husband

L’auditeur est avisé, les quinze titres exhumés de cette prestation ne sont pas forcément les plus attendus (Sunspots fait par exemple défaut), mais seront peut-être suivis d’une autre sortie qui permettra d’écouter la prestation complète… ou pas, est-on prévenu par le Gallois qui entretient toujours sur ses différents projets une mystique énigmatique qui contribue d’ailleurs pour partie à l’intérêt de sa production. Inutile de tourner autour du pot, il existe de meilleurs enregistrements pirates qui circulent sous le manteau, et qui donnent un éclairage tout aussi efficace des différentes périodes du bonhomme, qu’il soit seul en acoustique, ou entouré de musiciens dont le line up a évolué avec le temps.

Julian Cope
© Peter Noble

Mais cette sortie inattendue a le mérite de fixer sur disque le climat de cette tournée et ce, sans aucune tricherie, Cope étant très attentif à restituer au plus près l’ambiance du concert avec ses défauts et ses qualités, en évitant de tomber dans une compilation marchande de titres emblématiques, l’un des défauts majeurs des enregistrements publics. Le tracklisting est donc assez diversifié, oscillant entre des extraits de moyenne facture comme East Easy Rider, Double vegetation, Leli B et des titres rutilants et intouchables tels Out of my mind on dope and speed, Hanging out & hung up on the line, Julian H. Cope ou Reynard The Fox. On regrette un instant que Cope ne joue pas plus de guitares, laissant l’essentiel du travail à son comparse Mooneye, et le rendu global pâtissant peut-être d’un jeu qui laisse la part belle aux claviers et autres sons synthétiques. Mais l’aspect documentaire du disque est toutefois hautement relevé par certains morceaux de bravoure qui démontrent à quel point, quels que soient les arrangements choisis, les compositions tiennent par leur cohérence et servent cette tête chercheuse qu’a toujours été Julian Cope. Il faudra donc uniquement concevoir ce disque comme le prolongement scénique du double LP 20 Mothers (hautement recommandable soit dit en passant), mais qui donne néanmoins un aperçu avantageux, bien qu’incomplet, sur l’oeuvre passionnante de l’ancien Teardrop Explodes, sur laquelle Fanfare aura l’occasion de revenir dans un format plus long.

Tracklisting : 
East Easy Rider
Spacehopper
Nineteen ninety five
Sleeping Gas
Don’t Take roots
Leli B.
Passionnate friend
Torpelo
Julian H. Cope
Out of my mind on dope and speed
Double vegetation
Reward
Hanging out & hung up on the line
World shut your mouth
Reynard the fox

headheritage.co.uk

 

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