Si l’on pouvait être gagné par une vague de scepticisme à l’annonce du projet porté par Initials Bouvier Bernois, combo rennais qui manifestait un intérêt assumé pour la soul et le jazz (mais oui…), on est définitivement conquis par leur LP sorti il y a quelques semaines, auréolé d’un concert aussi magnifique que convainquant aux Transmusicales.
L’équipe gagnante n’est certes pas composée des perdreaux de l’année, mais intègre au contraire des musiciens confirmés qui ont été aperçus chez les Spadassins et les Madcaps. Il est donc logique que la barre fut placée si haut et autant le reconnaître tout de suite : elle est allègrement franchie.

Ici, on aime donc le Cha Cha, les rythmes latino-américains, les orgues Korg que viennent soutenir des cœurs jamais surchargés et des arrangements savants mais justes que ne renierait pas Nick Waterhouse. Du fabuleux Despair au remarquable Buenos Aires, en passant par l’entêtant Serotonine Tcha Tcha, l’auditeur lambda ne pourra pas résister longtemps aux caresses subtiles et rythmées dont ce groupe inédit vient nous gratifier, au fil de morceaux portés par une vraie culture musicale.
L’exercice n’était pourtant pas chose aisée et le crash aurait pu se trouver au rendez-vous si, intelligemment, le groupe n’avait pas teinté ses interprétations d’une légèreté de ton et d’un anachronisme classieux qui viennent faire de lui l’une des pépites de la scène rennaise actuelle. A telle enseigne d’ailleurs, qu’elle n’a pas échappé aux oreilles sagaces d’un Jean-Louis Brossard, concocteur des Trans, qui avant de les programmer à l’Étage, les a embarqués dans sa valise pour la tournée qui précède l’événement musical rennais.
On souhaite alors qu’enfin ce groupe ne cantonne pas sa renommée au grand Ouest comme ses aînés ont pu trop souvent le faire, et gagne au contraire une audience méritée bien au-delà des frontières bretonnes, en soutenant un album dont la principale qualité réside dans son originalité (c’est si rare…) sans verser pour autant dans l’excentricité exacerbée. Car chez Initials Bouvier Bernois, on sort des sentiers battus, c’est une certitude, mais on ne transige pas avec l’élégance du beau jeu. Hautement recommandable donc.