Hater est la sensation pop de la rentrée. Déjà dans le radar des plus attentifs depuis la sortie de leur premier album l’année dernière, ils confirment avec Siesta tout le bien que l’on pensait d’eux. Si leurs premiers titres ont été caractérisés un peu trop facilement de « dream pop », Siesta emprunte une voix qui ravira les fans d’indie pop 80’s. Fanfare a rencontré le groupe au grand complet à l’occasion de leur récent concert parisien. D’un premier abord timide, les membres d’Hater se révèlent être un gang de véritables passionnés, animés par une envie d’écrire des pop songs parfaites, sans aucun plan de carrière. Ils reviennent pour nous sur leur rapide ascension.
Cela faisait longtemps qu’un groupe scandinave dans une tradition purement pop n’avait autant fait parler de lui. Vous sentez-vous un peu isolé sur le territoire suédois ?
Lukas : Il y a d’autres groupes pop, mais ils sont moins exposés que nous. Wy, par exemple vient comme nous de Malmö.
Måns : La scène pop me donne l’impression d’être plutôt développée. On ne se sent pas isolés.
Lukas : Nous avons de la chance, nous sommes le pire groupe de pop du pays, mais nous avons une excellente maison de disque pour nous soutenir (rire).
Vous avez le mérite de sortir du lot !
Adam : C’est peut-être parce qu’on ne se met pas la pression. Notre ambition est uniquement d’écrire des chansons qui tiennent la route.
Lukas : Nous devons beaucoup aux mélodies vocales de Caroline. C’est ce qui nous apporte ce petit plus.
Måns : On passe notre temps ensemble. Tout va très vite avec nous. On se connaît tellement que si quelqu’un bloque lors du processus créatif, il y a toujours un membre du groupe pour l’aider. Cette solidarité n’est pas à négliger dans le succès de Hater.

A l’heure où la nouvelle génération ne jure plus que par le hip-hop et le r’n’b, avez-vous l’impression de faire figure de résistants ?
Lukas : Je fais partie de cette nouvelle génération qui écoute beaucoup de hip-hop.
Måns : J’écoute également du r’n’b. Il est moins commun aujourd’hui de faire partie d’un groupe. Beaucoup de gens enregistrent en solo, à la maison.
Lukas : Nous sommes un groupe organique. On compose ensemble. Donne nous cinq années et peut-être qu’on sera devenu un groupe de hip-hop (rire).
De quels groupes actuels vous sentez-vous proches et pourquoi ?
Lukas : Je reconnais une approche rythmique similaire chez Beach Fossils. C’est un groupe que j’aime beaucoup. J’adore leur dernier album. Il me relaxe. J’aime que, malgré des sonorités qui peuvent rappeler des groupes cultes, notre son soit vraiment personnel. C’est étrange d’être arrivé à ce résultat.
Måns : Aucun de nous n’a le même groupe préféré. Ça ajoute à la singularité de notre son.
Il est étonnant de vous retrouver avec ce nouvel album sur l’exigeant et excellent label Fire Records. Ses signatures récentes sont normalement à l’opposé de votre pop ligne claire. Pourriez-vous nous en dire plus ?
Adam: Nous ne le savions pas, mais le boss du label nous a vus en concert à Londres. Peu de temps après, il se trouvait à Austin au Texas pour le festival SXSW. Il est allé chez un disquaire local avec un ami à lui. Ce dernier lui a recommandé d’acheter notre disque. Il n’avait pas fait le rapprochement. Il a visiblement adoré.
Caroline : Il nous envoyé un email. Nous ne l’avons même pas lu, ce qui était stupide de notre part (rire). Étant persévérants, ils ont tenté de nous contacter par Facebook. C’est arrivé au bon moment car notre contrat avec PNKSLM venait de se terminer.
Lukas : Nous n’avions jamais entendu parler de cette maison de disque. Il nous a vendu l’affaire en nous disant que des groupes comme Teenage Fanclub et Neutral Milk Hotel étaient des anciens du label. C’était impressionnant.
Måns : Ce sont des passionnés qui se donnent à 100% pour promouvoir leurs artistes.
Les chansons de votre premier album avaient été composées un mois avant son enregistrement. Avez-vous fonctionné de la sorte pour Siesta ?
Adam : Nous avons commencé à composer dès la fin de l’enregistrement du premier album. Nous n’avons pas arrêté pendant six mois. Nous avons également eu le luxe de passer plus de temps en studio.
Lukas : Je crois que l’on avait l’équivalent de 70 démos. On a pris le temps nécessaire pour faire le tri. Nous ne reviendrons pas sur ce qui a été écarté. Nous avons déjà des idées différentes pour le prochain album.
Le son de ce nouvel album est plus lumineux, plus riche. On y entend même du saxophone sur I Wish I Gave You More Time Because I Love You. Pourriez-vous nous parler de l’évolution de votre son ?
Lukas : Pour une fois nous savions quelle direction prendre. Blushing, sur l’EP précédent, est un titre qui nous a tous mis d’accord. D’où notre volonté d’explorer cette piste. Nous avons globalement prêté plus d’attention à la production.
Caroline : Nous voulions accentuer notre côté pop au détriment des sonorités plus rock qui nous caractérisaient par le passé. Tout s’est décidé au moment de l’enregistrement de l’album. Par exemple, l’ajout d’un saxophone n’était pas planifié.
Måns : Nous étions si bien préparés que seuls deux titres n’étaient pas prévu pour Siesta. Nous les avons composés à la dernière minute. Le résultat nous a séduits.
Adam : Nous avions tellement le choix que l’album est deux fois plus long que You Tried, le précédent. Siesta dure une heure.
C’est le seul reproche que les médias ont fait à ce disque. Certains le trouvent trop long.
Caroline : J’ai lu ça également.
Lukas : Je m’en moque complètement.
Måns : Nous sommes entrés en studio avec 13 titres. Nous avons composé entre temps. Le tracklisting a évolué. Il nous semblait très bien fonctionner. C’est pourquoi la longueur nous importait peu.
Lukas : Je promets aux journalistes que le prochain album sera hyper cool. Il durera 15 minutes (rire).
Au regard du titre Blushing dont vous parliez à l’instant, considérez vous le EP d’inédits Red Blinders comme une transition entre l’ancien et le nouveau son de Hater ?
Caroline : Je n’y avais pas pensé.
Måns : Pour moi elles appartiennent au passé. Nous avions quatre morceaux de disponibles, l’idée de sortir un EP nous est parue évidente.
Lukas : Ces titres existaient avant la signature sur Fire Records. Aucun titre de Siesta n’avait encore été composé.

Les visuels sont très réussis, ils donnent une véritable identité au groupe. Pourriez-vous nous dire quelle était l’idée derrière cette pochette ?
Adam : Nous avions besoin de photos pour la presse. Ma mère travaille dans le monde du cheval. Nous sommes allés dans sa ferme avec une photographe nommée Kamila Schneltser. Les photos étaient si belles que nous les avons gardées pour l’album.
Måns : Tout est parti d’un discussion avec Kamila dans un café. Nous nous creusions la tête. Quand Adam a suggéré de se rendre dans l’écurie de sa mère, l’idée a paru excellente à tout le monde.
Pourquoi avoir enregistré ce disque en Suède avec votre producteur habituel (Joakim Lindberg, ndlr), alors qu’il aurait été facile pour vous d’avoir accès à des producteurs et studios étrangers ?
Caroline : Nous avons beaucoup échangé à ce sujet. Le nom de Joakim revenait systématiquement dans nos discussions.
Lukas : Il nous avait proposé des idées pour le deuxième album avant même que nous ayons composé la moindre note.
Måns : C’est agréable de travailler avec lui. Il venait juste d’installer un studio dans un vieil hall de gare transformé en atelier d’artistes. C’était plus confortable pour nous de continuer à travailler avec lui. Nous sommes très bon amis. Il ne nous a pas facturé les jours de studios supplémentaires. Toutes les conditions étaient réunies.
Tout s’est enchaîné très vite pour le groupe. En deux ans vous avez sorti deux albums et trois EP. Est-ce quelque chose de réfléchi ?
Måns : C’était notre plan initial quand nous avons fondé Hater. Nous voulions sortir nos morceaux sans attendre.
Lukas : Ce devait être ton plan, pas le nôtre. Je n’ai aucun souvenir de ça (rire).
Måns : C’est pourtant ce qui s’est passé avec le premier EP et le premier album. A peine composés, les titres étaient déjà enregistrés et sortis sur le label PNKSLM.
Lukas : Je pense que c’est plutôt lié au fait que nous sommes un groupe avec beaucoup d’énergie. J’espère que ça va durer (rire).
Crédit photo : Kamila Schneltser
Discographie :
Radius (EP) (2016)
You Tried (2016)
Red Blinders (EP) (2017)
It’s So Easy (Flexi) (2018)
Siesta (2018)
https://hatermalmo.bandcamp.com/
Merci à Alice Gros