Dropkick – Interview

 

On ne le répètera jamais assez : Dropkick est l’un des secrets les mieux gardés de la Pop. Avec pas moins de 14 albums à son actif, la formation écossaise a pourtant eu le temps d’affiner sa formule. A tel point que leur mélange parfait de jangle/power-pop, tout en guitares carillonnantes et en harmonies vocales à tomber, n’a plus à rougir de la comparaison avec les plus belles réussites de leurs compatriotes du Teenage Fanclub. En 2021, le groupe originaire d’Edimbourg fête ses 20 ans. A défaut de pouvoir célébrer cet anniversaire sur scène, Dropkick fait le bilan de ses deux premières décennies de carrière à travers une passionnante compilation de 30 titres qui pourrait leur servir de passeport vers une plus large reconnaissance. Rencontre avec le chanteur, guitariste et principal songwriter du groupe, Andrew Taylor.

Bonjour Andrew, quelle est la chanson la plus ancienne de l’album ? La plus récente ? Lorsque tu les réécoutes, quelles différences te sautent aux yeux ?

La plus ancienne, c’est Dog and Cat. Elle a été écrite aux alentours de 1999 et faisait partie de notre premier album de démos. Puis on l’a ré-enregistrée pour l’album Obvious de 2006. C’est cette version qui est dans la compilation. La plus récente s’appelle Into the Background. Elle a été composée en août 2020. A ce moment-là, le confinement avait été allégé et Mike a pu venir chez moi ajouter sa partie de batterie. On s’est tous dit qu’il fallait qu’on inclue un titre nouveau à ce best of et celui-ci est un « Dropkick classique », dans le genre « jangle pop » (type de rock alternatif popularisé par les Byrds dans les années 60), très court et bourré d’harmonies. Ce qui me semble différer entre ces deux titres, ce n’est pas tant dans l’approche musicale ou stylistique, c’est plutôt les souvenirs qu’ils évoquent pour les membres du groupe à ces périodes données. Dropkick a eu beaucoup de chance de croiser la route de plein de grands musiciens et d’accueillir des amis et de la famille tout au long de son parcours. Je n’entends pas vraiment de différences, j’entends surtout tous ces gens et leurs contributions.

Quand as-tu commencé à écrire des chansons ? As-tu sorti ces premières tentatives, ou les as-tu réenregistrées plus tard ? 

La première expérience d’écriture dont je me souvienne doit dater de 1994, quand j’avais 13 ans. J’ai essayé de pondre plein de trucs dans le style Heavy Metal, pas terribles j’avoue. C’était pour la première mouture du Dropkick qu’on avait monté au lycée, avec mon frère et notre pote Ian Grier. Haha. Puis, on a réalisé qu’aucun de nous n’avait de voix de « métaleux ». On a vite laissé tomber pour nous focaliser sur des chansons courtes et mélodieuses. L’album Dookie de Green Day a été une grande inspiration à l’époque. Les années qui ont suivi, on a enregistré des titres sur des portables multipistes puis on les a archivés. Il y a plus de 20 mini-disques pleins de chansons de cette époque. Je les ai retrouvés récemment et j’ai même déniché une mélodie que j’ai retravaillée pour le groupe que je forme avec Gonzalo Marcos, Boys with the Perpetual Nervousness. Aujourd’hui, j’enregistre surtout de courts titres audios sur mon téléphone (avec des paroles qui n’ont pas vraiment de sens et quelques accords). Quand j’ai un peu de temps pour me dire que je referais bien un album, je retourne vers ces démos et je peaufine toutes ces idées. Les quatre derniers albums de Dropkick ont été écrits sur mon téléphone.

Qu’est-ce qui t’obsède le plus quand tu bosses sur une chanson, la mélodie, le son, le texte ?
Dans mon cas, les accords et la mélodie viennent en même temps. Pour remplir l’espace, j’utilise des mots qui constituent des phrases plus ou moins logiques. Parfois elles collent bien et je les conserve, même si je ne suis pas toujours sûr de leur signification ! Dans la majorité des cas, les chansons arrivent d’un seul jet et je reviens rarement dessus pour les réécrire ou y ajouter quoi que ce soit. Quand j’essaie, j’empire généralement les choses en faisant mine d’être trop intelligent.

En préparent ce best of, as-tu redécouvert certaines de tes chansons ? Certains titres sonnaient-ils mieux que ce que tu avais en mémoire ?
Pas mal des chansons qu’on a choisies couvrent nos albums plus anciens mais beaucoup font toujours partie de notre répertoire en concert. Elles me sont familières, mais un peu moins dans leurs versions originales. J’ai redécouvert des petits détails que j’avais oubliés, comme des parties de mandoline, une manière de chanter ou des harmonies qu’on faisait alors différemment. Le premier titre du best of, Until I fall Away est une des plus belles redécouvertes. Il date de l’album Paper Trails de 2012. Chaque chanson de cet album avait été enregistrée et mixée lors de sessions de  2 à 3 heures seulement à chaque fois. Le mixage n’était pas très soigné ou abouti et je n’ai jamais été vraiment emballé avec le résultat. En réécoutant tout ça, je suis tombé sur une démo qui proposait une version alternative des voix, qui m’a beaucoup plus plu, du coup on l’a remixée.

Est-ce que ça t’a donné des idées pour l’album suivant ?
Je n’ai pas vraiment pensé à un nouvel album, ce qui est assez bizarre pour moi! Début 2020, on a sorti The Scenic Route. C’était juste quelques mois après mon 2ème album solo, Somewhere to Be. Pendant les mois de confinement de 2020, j’ai écrit plein de trucs, 40 chansons enregistrées à la maison que j’ai versées sur Bandcamp tout au long de l’année en téléchargement gratuit. Depuis, je me suis occupé de ce best of et on vient de sortir le deuxième album de Boys with the Perpetual Nervousness. Je suppose que tout le monde doit en avoir assez de mes nouvelle chansons, ah ah ! En même temps, j’ai quelques idées qui sont stockées sur mon téléphone et j’aimerais bien proposer une véritable sortie de ce que j’ai réalisé pendant le confinement un de ces jours.

Si tu devais envoyer l’une de tes chansons à un artiste que tu admires, qui choisirais-tu ?
Je pense que j’aimerais bien savoir ce que Jeff Tweedy pense de mes chansons, n’importe laquelle ! Haha. Mais je n’aurais jamais le courage de lui envoyer quoi que ce soit.

Je suis sûr que tu pourrais me donner une dizaine d’exemples, mais est-ce que tu pourrais me citer deux artistes qui représentent un certain Graal en terme d’écriture de chansons ?
Disons qu’en plus de Jeff Tweedy et tout ce qu’il a pu écrire pour Wilco, j’ai toujours trouvé quelque chose qui me plaisait dans tous les albums des Jayhawks. Je pense qu’Elliott Smith était l’un des auteurs les plus talentueux de sa génération également. Je reviens très souvent vers ses albums à la maison.

As-tu déjà pensé utiliser du cor anglais ou des cuivres dans tes arrangements ? J’ai l’impression que ça se marierait parfaitement avec votre style. Et du piano aussi !
J’avoue que je n’ai jamais pensé au résultat que ça donnerait sur du Dropkick. Sans doute parce que je ne connais aucun musicien à qui demander. Si on avait un gros budget de concert, je serais ouvert à une section de cuivres ! J’adore The Band et la manière dont ils utilisaient les cuivres, donc je pense que ce genre d’arrangements rendrait bien.

Comment est-ce qu’un groupe comme Dropkick gère l’impossibilité de donner des concerts depuis des mois ?
Ça nous a bien affecté d’apprendre que la tournée de promotion de l’album The Scenic Route, qui devait débuter en avril 2020, serait annulée puis toutes les autres dates de l’année. Le dernier concert de Dropkick, c’était un duo acoustique, moi-même et notre bassiste, Alan Shields, à paris en octobre 2019. On était censé jouer en Ecosse, en Espagne, en France et dans quelques festivals l’an dernier. Le confinement dû au Covid nous a donc impacté directement mais ça va passer. Ce qui pourrait entraîner des groupes comme le nôtre vers les abîmes, ce serait plutôt ce stupide Brexit. Car de nouveaux frais sont maintenant en jeu si on veut jouer en dehors du Royaume-Uni et notre cachet ne les couvrira certainement pas. C’est un véritable désastre et je ne vois pas comment on va pouvoir le régler. On souffre déjà de l’impact que ça a créé au sein du groupe et c’est valable pour tous les musiciens.

Est-ce que tu pourrais choisir deux photos importantes ou émouvantes des 20 dernières années et les commenter ?   
La première date de 2007, elle présente notre première incarnation. Je l’ai découverte il y a peu de temps. Malheureusement, notre ex-bassiste, qui était également mon cousin, Stuart Low, est décédé début 2007. Même s’il n’avait pas joué avec Dropkick depuis plusieurs années, il faisait partie du noyau dur de nos supporters et on échangeait souvent sur les chansons, les concerts, les enregistrements et des trucs techniques de “geeks” concernant les instruments et les équipements. Il nous manque énormément.. La compilation est également une manière de rendre hommage à sa précieuse contribution durant les premières années du groupe.

La deuxième photo a été prise lors de l’une de nos dernières répétions à notre quartier général d’Edimbourg. L’immeuble est bouclé depuis plus d’un an et pas mal de notre matos se trouve enfermé à l’intérieur. On a répété et enregistré dans ce lieu pendant 10 ans. Je m’y suis rendu au moins une fois par semaine ces 10 dernières années, j’avoue que ça me manque, surtout qu’on s’y est beaucoup amusé.
Pourrais-tu me raconter une petite histoire marrante sur le groupe ? 
Je parlais récemment à quelqu’un d’un concert qu’on avait donné il y a plus de 10 ans dans le nord de l’Ecosse. On avait alors essayé de créer une version petit budget du «Spinning songbook » d’Elvis Costello (Elvis Costello utilisait une grande roue sur laquelle était inscrite des dizaines de chansons, qu’il faisait tourner. Lorsque l’aiguille s’arrêtait sur une chanson au hasard, il la jouait). Je crois qu’à l’époque on avait plein de titres qu’on voulait interpréter et on n’arrivait pas à se fixer sur une liste arrêtée. Bref, on avait avait installé un jeu de fléchettes à côté de la scène, sur lequel on avait étiqueté les noms de nos chansons. L’idée était que le public lance des fléchettes sur la cible. On avait ajouté en plein milieu de la cible un titre que le public pouvait choisir. Il fallait que ce soit une reprise que tout le monde connaisse. On s’est dit qu’il y avait peu de chance que quelqu’un vise dans le mille. Le premier gars qui s’est avancé a directement atteint le centre de la cible et nous a demandé une chanson de Pink Floyd. On ne savait pas du tout comment la jouer mais on ne s’est pas dégonflé, on a ouvert notre concert de la manière la plus catastrophique qui soit, 5 minutes de grand n’importe quoi ! Une bonne partie du public s’est barrée d’ailleurs !

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